31.10.06

la chasse



au troisième étage du parking écuyer où l'on chassait des œuvres d'art, appareil au poing et poses étudiées, on avait croisé un couple de garçons qui se tenaient très près l'un de l'autre
en passant à côté de moi, le plus audacieux avait promené sa langue sur les lèvres en me fixant droit dans les yeux, il avait fallu cinq étages supplémentaires et une vue imprenable sur bruxelles pour que je parvienne à chasser de mon esprit les râles éperdus que je les imaginais pousser tandis qu'ils faisaient indubitablement l'amour dans une cage d'escalier, entre deux voitures ou dans l'ascenseur qui les rendait à la ville

30.10.06

la chambre d'hôtel

au-dessus du lit de la chambre d'hôtel, le tableau n'appelait aucune pensée, aucune réflexion, de sorte que, même lorsque nous faisions l'amour, nos regards renversés ne s'y fixaient pas : c'était sans nul doute sa raison d'être, le peintre, surdoué, avait su n'offrir à sa toile aucun point d'accroche, le paysage n'était pas reproduit pour qu'on le regarde mais pour nous regarder



on avait acheté une lampe de chevet pour la chambre d'hôtel qui n'en possédait pas, un abat-jour à fleurs à trois euros qui était vendu sans ampoule, on s'était renseigné auprès de la caissière sur l'endroit où l'on pourrait s'en procurer une et le nombres de watts que supportait la lampe, elle nous avait indiqué un bricomarché sur une artère principale, à quelques mètres de là, on s'y était rendu étrangement satisfait, acheter une ampoule représentait un premier pas vers bruxelles, on commençait à se meubler

tu avais le vertige et à chaque fois que tu t'approchais du balcon de la chambre d'hôtel pour photographier le ciel ou les toits de la ville, je voyais ton corps basculer dans le vide, j'entendais le fracas de ta chute, le cri des touristes et j'imaginais que j'attendrais là, sans bouger, à jamais, ton retour

tu lisais sur le lit de la chambre d'hôtel, j'écrivais sur une tablette acajou qui proposait un bouquet de fausses fleurs jaunies, bruxelles était une étape, nous allions mieux

26.10.06

l'efficacité



pour le voyage à bruxelles et la publication d'extraits du blog dans le numéro 5 de la revue pylône qui serait lancée pendant le festival d'octobre, tu m'avais demandé de nous fabriquer des petites cartes de visite de sorte que, si l'on venait à nous demander l'adresse du site, nous ne soyons plus obligés de griffonner sur un coin de nappe déchiré les coordonnées de l'emploi du temps en nous mordant les lèvres, moi pour tenter, en vain, d'être lisible et toi, pour ne pas oublier une barre, une lettre ou un point

25.10.06

la sieste



dormir présentait de nombreux avantages : celui de se reposer, d'évacuer la tension et le stress dans un sommeil nébuleux et lourd; la digestion s'y déroulait dans l'inconscience, loin des maux de tête ou de ventre inhérents à un repas trop arrosé; on y noyait généreusement les heures creuses de la journée, se rapprochant ainsi d'un but inavoué ou attendu; on y rencontrait enfin toute sorte de gens dont le quotidien avait eu raison, avec lesquels on pouvait à loisir échanger des propos incohérents, régler ses comptes, faire divinement l'amour ou vivre les aventures les plus incongrues -le rêve permettait tant
au second réveil, car c'est d'une sieste post-prandiale qu'il était question, la journée s'était doublée d'une nouvelle porte d'entrée par laquelle on renaissait à la réalité, neuf et fripé comme un nourrisson, et si la nuit portait conseil, la sieste portait bonheur

24.10.06

la crise



au moment de sortir, alors que tu avais déjà mis bottes et jeans et qu'il ne te restait plus qu'à enfiler un polo, tu avais soudain pris peur : personne ne t'attendait et tu n'avais pas envie de sourire à des inconnus, tu avais refait le compte des tâches que tu avais à accomplir, plus par volonté que par réelle nécessité t'étais-tu dit, rien ne t'obligeait en effet à descendre en ville, à longer l'avenue principale, tu pouvais éviter les grands axes et te contenter de tourner dans le quartier comme un cheval dans un enclos délimité, tu avais secoué la tête à l'image de l'animal, tes naseaux fumaient, tu t'étais étendu sur le dos en attendant que la crise passe mais déjà tu savais que tu avais renoncé et que tu ne ferais rien des choses inutiles que tu avais prévues pour meubler ton après-midi et te faire croire que tout allait bien

23.10.06

la sémantique



la pluie sur les carreaux, il regardait l'extérieur avec une vague sensation de malaise, il était en vacances, cela ne voulait rien dire un jour comme celui-là, déjà la veille, le dimanche, être en vacances ne correspondait à rien, le lundi c'était la même chose, il ne travaillait pas les lundis, aussi les vacances ne débuteraient pas avant le mardi, il avait hâte de se réveiller en vacances, tôt, de bonne humeur, prêt à arpenter la ville, les villes, le cœur léger, et non pas comme ce matin-là, avec une ombre sur la tête qui planait depuis trop longtemps et le ramenait chaque jour au jour d'avant

22.10.06

la page



où sont retranchés les souvenirs, les traumatismes, derrière quel rempart, quelle impossible issue, où sont cachées les fautes des parents, derrière quel drame tu, emmuré, pourquoi les images ne s'incarnent-elles pas, les véritables coupables ne se révèlent-ils pas, quelle solution pour que l'histoire soit finalement dite, une fois pour toutes, et que l'on tourne la page?

21.10.06

la colonne



assis sur le siège des toilettes, je craignais que le bloc-miroir de la pharmacie, fixé imprudemment dans un mur affaibli par la porosité de la pierre et l'humidité de la pièce, tombe sur mon dos et me brise la colonne, je craignais davantage encore qu'en chutant, la vitre de l'armoire n'entame la peau et ne dénude les vertèbres l'une après l'autre, comme on pèle une banane, me laissant inanimé sur les tomettes, les os à vif, il eut été préférable qu'en tombant, la pharmacie me tuât, et je souriais à l'image de ce corps nu, abattu en plein travail par une surcharge de médicaments périmés, répandus en pluie de gélules et de dragées multicolores autour du cadavre, mon petit carnaval personnel

"les bronzes", jan fabre

20.10.06

la préhistoire



tu t'allongeais dans le noir, tu attendais que les autres soient au lit, tu restais seul dans le salon, le casque sur les oreilles tu passais tes disques les meilleurs, c'était des 33 tours, kate bush en tête, tu n'avais pas besoin de lumière pour dégager les disques de leur pochette, pour les positionner sur la platine, tu savais sur quelle touche il fallait appuyer, même les yeux fermés, pour lancer la rotation, le saphir craquait en touchant le vinyle, la musique ne se faisait pas attendre, tu connaissais les intros par cœur, au blind test tu aurais fait un malheur, sur l'appareil les décibels dansaient en petites pointes vertes et rouges quand la chanteuse montait trop dans l'aigu ou quand les basses s'emballaient, que la musique t'emportait la tête, tu te levais alors, tu regardais la place déserte dans la nuit, le vent qui faisait trembler les palmiers, tu te souviens d'une atmosphère de préhistoire, la ville dormait, debout, à l'affût, tu cherchais dans le mouvement des palmes un message pour l'avenir, la nuit chuchotait que tu deviendrais quelqu'un et toi, unique, solitaire, tu écoutais

19.10.06

l'opéra



il n'y avait aucune façon de rendre l'émotion que provoquait chez moi l'écoute de l'opéra contemporain que tu avais rapporté de paris, les mots ne diraient jamais le rythme ni la répétition, seule la danse aurait eu une chance de reproduire charnellement la qualité particulière des enchaînements, comme cette chorégraphe belge qui tournoyait sans cesse contre son ombre sur la musique de phil glass, les voix se perdaient ici sous les notes, les accords dissonaient en crescendi assourdissants, il y avait des musiques à écouter paisiblement et des musiques à vivre violemment, à ressentir au fond de soi jusqu'à l'insupportable, tellement fort que j'en avais quitté le lit à la première écoute, incapable de supporter la position allongée, il avait fallu que j'écrive, il avait fallu, comme face à la chorégraphe belge, que l'art se confronte à l'art qui lui-même se confrontait à l'art, en ombres, en miroirs, en échos, il y avait des moments où l'art se vivait passivement et d'autres où il fallait le prendre en mains, en ventre, le faire sien, l'internaliser et à partir de lui, créer à son tour au risque de l'écueil, ou de la folie

18.10.06

l'optimisme



il avait parlé de tristesse douce, tu avais trouvé l'expression jolie même si elle ne te correspondait pas, du moins ce n'était pas du tout ce que tu imaginais dégager, la tristesse n'était pas un état dans lequel tu te complaisais, tu n'étais pas triste tu étais malheureux, une façon chronique d'être au monde, entre nostalgie molle et désespoir excessif, le sentiment ne te satisfaisait pas non plus, disons que, au risque d'enfoncer une porte ouverte, être malheureux ne te rendait pas heureux, tu aspirais à une sérénité profonde de celles qui permettent de s'étendre au soleil en fermant les yeux et de profiter du souffle du vent et de l'eau de la piscine en gouttelettes sur la peau sans penser à rien, étrangement tu n'avais aucun doute sur le fait que cela allait venir, être malheureux n'empêchait pas d'être optimiste

16.10.06

la générosité



les jours où je ne travaillais pas et où toi tu travaillais, tu te demandais souvent avant de partir le matin dans quel état tu allais me trouver le soir, tu savais que cela dépendrait des appels que je recevrais, des courriers, électroniques ou non, qui me seraient adressés, des visites que j'aurais, des amis que je rencontrerais, des nouvelles que j'aurais à te donner à ton retour et tu lisais leur absence en poussant la porte de l'appartement, et, désolé, malgré ta journée dans les pattes et le repos que tu avais bien mérité, c'est moi que tu réconfortais

15.10.06

octobre



«le mois de mai s'est joué de moi cette année
j'ai laissé couler trop d'émoi cette fois
le mois de mai s'est moqué de moi cette année
j'ai laissé couler trop d'émoi cette fois»
émilie simon, le vieil amant

14.10.06

le croque-monsieur



à douze ans, je m'enfermais dans la cuisine avec un morceau de gruyère, un paquet de pain de mie, du beurre et du jambon, je tartinais à tout va, je coupais, j'égalisais savamment, le beurre je ne comptais pas, ma petite touche personnelle, c'était d'en mettre une noisette sur le croque-monsieur que je saupoudrais de fromage râpé, le plat suintait la graisse, froid c'était encore meilleur, quand il en restait, que je les enveloppais dans du papier d'aluminium et que, les yeux pleins d'appétit, je regardais éric les engouffrer en me jurant que c'était les meilleurs du monde

13.10.06

la nouvelle saison



lorsqu'un feuilleton reprenait, après une année d'interruption et ses vingt-quatre épisodes réglementaires digérés, on parlait de nouvelle saison
j'avais cette sensation dans ma vie, la nouvelle saison venait de commencer, on avait conservé l'intrigue principale, le héros et la plupart de ses proches, certains éléments restaient immuables, ils contribuaient à la fidélisation mais il y avait eu des disparitions (rupture de contrat, départ, casting pour une autre série), des changements de décor, de situations, de relations même, il y aurait bien entendu des guest-stars, c'était capital pour la réussite du programme, d'illustres nouveaux venus auxquels on s'attacherait rapidement en oubliant les précédents, et on opinerait du chef autour d'un bon repas en se faisant la remarque que c'était une sacrée série et sans nul doute la meilleure saison -jusqu'à la suivante

12.10.06

le matin



le ciel était bleu au petit matin, la température plus fraîche que les jours précédents, un pull ou une veste était nécessaire pour se rendre jusqu'au café, il était tôt, quelques heures avant le travail, la torréfaction sentait bon le grain moulu, une odeur croustillante, grillée qui montait à la tête, enivrante, le livre était posé sur la table, auprès des clés et de l'appoint, il n'y avait personne encore, juste le patron, deux clients et la ville autour d'eux

11.10.06

florence



à quinze heures cinquante-cinq, juste à la fin de l'enterrement, l'horloge de ton téléphone portable s'est arrêtée pour ne se remettre en marche que lorsque tu as quitté paris, après un dernier passage par le cimetière

10.10.06

l'animal



je ne savais pas m'asseoir normalement dans un fauteuil, c'était plus qu'une habitude, dans la voiture, déjà, siège passager ou à l'arrière je ramenais les jambes en lotus, je me souvenais que je tenais facilement l'équilibre sur les deux jambes repliées, les fesses dans le vide, à la manière d'un fauve, sans équilibrer avec les mains par terre, il m'arrivait aussi au lycée de me percher comme un oiseau sur le dossier d'un banc, je ne cherchais pas la légèreté mais la balance exacte, j'avais été modèle, pour une école d'art, j'avais aussi posé nu pour un photographe qui craignait pour moi quand je retournais les pieds d'une table pour me fondre parmi les barres de métal, comme une araignée dans sa toile ou un singe dans son arbre, allongé sur le ventre j'aimais qu'on me caresse, de l'homme à l'animal il n'y avait qu'un maillon de la chaîne à défaire, ce n'est pas tant que j'étais dangereux, je n'avais rien contre les cages du moment que le dresseur m'avait à la bonne et rien ne disait qu'une fois la porte ouverte, ou la chaîne brisée, je me serais enfui

9.10.06

le père noël



le facteur prenait son temps pour monter les trois étages, j'avais enfilé vite fait un pantalon et un débardeur, il avait sonné à l'interphone, il y avait un colis que j'espérais sans avoir eu la certitude qu'il avait été envoyé, je m'étais demandé la semaine précédente si j'allais lui offrir un café, au facteur, on se croisait de temps en temps sur l'avenue quand je partais au boulot et qu'il garait sa camionnette marquée la poste, la voiture débordait de paquets, pour moi c'était un petit peu le père noël, ce gars-là, mais en bleu et jaune au lieu du rouge traditionnel, il m'avait tendu l'enveloppe épaisse, j'avais fait ma proposition sur le pas de la porte, je m'attendais à un refus poli, la voiture à déplacer ou du travail par dessus la tête, mais il avait souri au contraire, reconnaissant, il s'était assis dans la cuisine, on avait parlé des conditions de travail, de la direction qui n'y comprenait rien et des rapports humains indispensables, je m'étais dit que ce n'était pas plus compliqué que ça, finalement, d'entretenir des relations avec le père noël

8.10.06

l'amour



«je te couvrirai de pétales de rose
je te garderai, je suis ton chien, ta chose
je t'attacherai avec sept cheveux rouges :
notre propre piège se resserre si tu bouges»
elli medeiros, soulève-moi

7.10.06

le chèque



j'avais reçu un chèque, c'était encore rare que l'on paie pour l'écriture, dans une enveloppe de la maison d'éditions, c'était une enveloppe très sobre au dos de laquelle était noté le chiffre 2, le chèque était d'un montant élevé, en francs suisses la somme était déjà coquette mais il fallait multiplier encore, à cette époque mon découvert avoisinait à peu de chose près cette somme-là, j'avais appelé l'éditeur qui ne savait pas d'où cela venait, il avait fait suivre le courrier sans y prêter attention, quand j'avais dit que c'était une sacrée somme quand même, il avait ri en demandant combien de sa voix particulière, mais j'avais gardé cette information pour moi, je m'étais demandé si je n'avais pas gagné un prix dans ce pays-là, un prix littéraire nébuleux dans une foire du livre inconnue, j'avais fait des recherches mais mon nom et mon titre n'apparaissaient sur aucune liste, j'avais fini par avoir des doutes sur la qualité de cet argent, de l'argent sale évidemment, à cause de son origine et du contexte j'avais pensé à la guerre et aux allemands, j'avais posé le chèque sur le bureau de la chambre, méfiant, en me promettant de ne jamais l'encaisser jusqu'à ce que le banquier me rappelle à l'ordre et, triomphant, j'avais poussé la porte de l'établissement en criant haut et fort que je devenais quelqu'un, la preuve

6.10.06

l'erreur



il faudrait un accroc, une virgule en trop ou une faute au milieu de la phrase, il faudrait quelque chose d'inattendu, qui échappe à la maîtrise, quelque chose qui lâche, qui témoigne du passage, il faudrait une erreur, ici, pour dire la fin de l'histoire et prendre un autre livre

5.10.06

strip-tease



le choix des vêtements n'était pas difficile en soi, c'était plutôt définir le moment où tu devais t'habiller qui posait problème, tu pouvais laisser passer les minutes jusqu'à leur dernière extrémité avant de te jeter littéralement sur les fringues de la veille ou de taper au hasard dans les placards de la chambre, tu aimais pour cela l'hiver qui te permettait en un temps record d'accumuler diverses couches de vêtements, non pas que tu craignais le froid (au contraire, tu avais mis un point d'honneur à ne jamais en souffrir, imitant en cela l'impassible déesse noire qui te tenait lieu de référence), mais tu te laissais ainsi la possibilité d'en changer au gré du temps, selon que ce que tu portais te convenait ou non, l'été était un supplice, passés les jeans immuables et un polo terre, tu regardais tes bottes et tes pulls avec nostalgie, l'hiver tu muais au fil des heures -restait cette satanée peau qui te collait au cuir, dont tu ne te débarrassais pas, qui te suivrait jusqu'au jugement dernier, que tu étais trop lâche pour éplucher méticuleusement, lambeau après lambeau, et voir enfin ce que tu avais dans les tripes

4.10.06

le carnage



le moustique gisait sur la plinthe, son corps plié en deux, mutilé, une aile écrasée sous le ventre, aveugle et presque mort; sur le mur blanc, à la place qu'il occupait auparavant, une tache rouge, comme un petit point d'encre bu par une feuille de papier épais, témoignait de la vie qu'il avait volée et qui l'avait trahi
sous le lit, les araignées voraces salivaient, piques et crocs affûtés, leurs mille yeux focalisés sur l'insecte vulnérable, dans l'attente fébrile du retour de l'obscurité
un soupir, un mouvement lourd sur le matelas et puis, silencieux, le carnage

"versus, 2005",
noé sendas, le plateau, paris

3.10.06

alimentaire

le travail avait repris, différent d'avant mais c'était toujours le travail, avec la reprise du travail il y avait les habitudes, des choses bêtes comme le repas de midi, la pause de onze heures, la pause de cinq heures, tu ne te soumettais pas aux pauses, tu zappais le passage obligé à fixer les chaussettes mickey d'untel pour ne pas prendre part aux conversations stériles des autres devant un café dégueulasse, tu avais réussi à imposer une troisième heure de déjeuner, il fallait que la pause ait lieu entre midi et deux, tu avais ramé, aujourd'hui grâce à toi il y avait trois créneaux, et vu le sous-effectif, c'était plutôt une bonne nouvelle de savoir que l'on allait se retrouver sur deux rayons pendant une heure plutôt que sur quatre les mercredis ou les samedis, le travail te bouffait la tête, tu remarquais à certains moments, lorsque les gens t'adressaient la parole, qu'il te fallait une dizaine de secondes, notables pour eux qui étaient toujours dans l'urgence, avant d'enregistrer leur demande, et parfois même leur présence, tu ne souffrais d'aucun mal particulier, tu étais vendeur à la fnac de nice depuis six ans, ça n'était pas grand-chose au fond, un boulot alimentaire on appelait ça, n'empêche que tu rentrais chez toi pour te vider la tête et tu ne trouvais rien de mieux à faire que d'écrire une note sur ton travail

2.10.06

la coquetterie



bien sûr ça ne m'avait pas échappé, c'était là, juste sous la main, il y avait un relief que je n'attendais pas, dont l'évidente présence n'aurait pas dû me surprendre, j'avais un penchant pour les pizzas et le vin rouge, le cholestérol était mon ennemi, non pas juré, il parsemait ça et là mes artères comme une belle cuillère de parmesan savamment saupoudré, je surveillais de près son taux, j'avais rêvé la veille, comme quoi les prémonitions existent, que les analyses confirmaient la sténose, il fallait un régime, vite fait bien fait, finis les restaurants italiens et les desserts au chocolat, je m'étais réveillé en suffoquant, non ça allait, le taux n'avait pas bougé, il faudrait de nouvelles analyses pour le confirmer mais je ne faisais pas d'excès, bien sûr ça ne m'échappait pas, à quarante ans je n'étais plus le gars longiligne dont les amies (et le féminin n'est pas une erreur, les garçons ne me disaient rien alors) vantaient la silhouette, étrangement la prise de poids attirait l'œil, elle asseyait le bonhomme, je n'étais plus un gamin, j'étais un homme, il y avait eu l'espace d'une minute une coquetterie face à l'écran, le désir d'effacer la note, de faire disparaître les preuves, et puis j'avais baissé les yeux sur mon corps nu, et j'avais souri

1.10.06

collection






collection n.f. (lat. collectio, de colligere, réunir) : réunion d'objets choisis pour leur beauté, leur rareté, leur caractère curieux, leur valeur documentaire ou leur prix.