17.7.06

l'impasse



je racontais que mes voisines du premier étage, d'origine marocaine ou tunisienne, je n'étais pas sûr, mettaient la musique très fort et parlaient au téléphone en se penchant à la fenêtre dans la cour et que mon voisin du deuxième, juste en dessous et d'origine indienne, cherchait à rivaliser avec elles et augmentait le volume des cd bollywoodiens qu'il écoutait en fin d'après-midi, je disais que c'était comme un concours entre eux, dont le seul résultat était que nous avions l'impression de vivre en leur présence dans l'appartement, je remarquais la lueur qui s'allumait dans le regard de mon auditoire, le doute qui s'immisçait sur le racisme dont je faisais peut-être preuve, je me disais que si les voisins avaient été suédois et anglais, personne n'aurait rien pensé de ce que je venais de dire, voulant me déculpabiliser -puisque je me sentais le premier coupable- je rajoutais que les voisins du même palier que nous discutaient un soir avec des gens de l'immeuble en face, tellement fort que j'étais sorti sur le balcon, harassé, pour dire que j'en avais plus que ras-le-bol, je souhaitais apporter cette précision que ces voisins-là étaient blancs, mais le mot me paraissait exagérément insidieux, aussi je ne disais rien de plus, bredouillais finalement une banalité sur les rapports de voisinage, certain que je ne m'en sortirais jamais

8 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Tu n'as pas être surpris par la réaction que tu as eu face aux débordements verbaux de tes voisins. Il m'est souvent arrivé de connaître le même type de réaction. Pourtant, ce qui m'interpelle dans ton propos, c'est le fait que tu fus gêné que tes voisins croient que tu soit raciste. La vie en communauté nécessite un minimum de courtoisie et de respect mutuel. Tu as le droit de t'énerver et de crier ton exaspération. Ce qui semble paradoxale dans cette situation provient de cette atmosphère actuelle où on accorde plus d'importance à celui ou celle qui tient un propos que sur la teneur du propos en lui-même.C'est le paradoxe du locuteur. Combien de fois n'ai-je entendu mes compatriotes protestaient contre les dires d'un tel ou un tel mais jamais contre la réalité du discours.L'état civil du locuteur avait plus d'importance à leurs yeux que sa réthorique. Nous vivons un moment étrange où nous nous observons au lieu de nous écouter. Nos réactions pourtant légitimes sont dictées le plus souvent par le politiquement correct et non par une quelconque politique de la courtoisie. C'est une bien triste période qui s'entrouve où l'humain cherche des signes de reconnaissance dans l'image que lui renvoit son interlocuteur et non d'essayer d'échanger. Sartre avait coutume de dire qu'il fallait essayer de penser contre soi-même. J'ai bien peur que notre époque érige bien plus le fait de penser avec soi-même. Tu me ressembles donc je t'écoute. Tu es légitime. Tu ne me ressembles pas, je ne veux pas t'écouter. On oublie que les plus grandes avancées ont eu lieu parce que des personnes qui n'étaient pas concernées par tels ou tels problèmes ont agi par conviction et non par atavisme. Cordialement mohamed.

11:30  
Anonymous Anonyme said...

Belle analyse, Mohamed. Et triste constat.

16:27  
Anonymous Anonyme said...

merci, mohamed
comme toujours, au-delà de ce qui se passe avec les autres, ce qui m'intéresse ici c'est aussi ce qui se passe avec moi-même : que l'autre ait une opinion, c'est un fait ; que je ne sois pas capable de faire preuve de discernement en ce qui me concerne (me croire / me penser moi-même raciste, ne serait-ce qu'un instant) est plus intéressant
amicalement,
lh.

20:51  
Anonymous Anonyme said...

la vie est une roulette.
on est rouge ou noir.
on juge ses pairs, on a peur des commettre des impairs.
parfois on se manque et on se retrouve dans l'impasse.

22:22  
Anonymous Anonyme said...

Tu avais déjà évoqué le sujet, cette malencontreuse pseudo-culpabilité qu'inflige dans la bagarre de nos pensées, de nos émois premiers, le conditionnement médiatique (sachant que la plupart de ces pensées sont des contractions virales plus que des productions autographiées).
Mohamed le distingue.
Nous le distinguons.
Et ce midi encore via un reportage télévisuel sur le Liban ma mère (qui passe beaucoup de temps à refouler en vain son racisme basique) trouva ridicule les apparats d'un rabbin qu'elle prît pour un imam fanatique.
Ce qui devrait te "rassurer" devrait se situer dans la tranquillité avec laquelle, en deux secondes, tu peux oublier ces graviers d'achoppement dès que tu serres la mains d'une origine étrangère.
De même, quand je serre la paluche d'un collègue, je sais qu'il n'a pas oublié que je suis pédé, et moi-même n'oublie pas que je le suis à ses yeux. Deux passables négativités, disent les physiciens, créent de la durable possivité.
Nous sommes une génération palier: avec un peu de chance, notre réflexion permettra à la suivante de désactiver ces artificiels démons.
Il se peut aussi que je dise une énorme connerie...

00:01  
Anonymous Anonyme said...

Quoi de plus etrange, que de se penser raciste quand on s appelle omar?
Et pourtant, ce "je ne sais pas si c est du racisme" est bien la, ce"..." du non respect que l autre a pour ma facon de vivre qui fait que je m enflamme des qu il se met a gueuler publiquement sa vie sur son balcon et moblige en toute indescence a rentrer dans un monde que je meprise parce que vulgaire.

Ce nest pas sa couleur, ce nest pas sa religion, ce nest pas sa musique ou son nom,sa preference sexuelle ou lodeur de sa bouffe, c est un aspect du monde,de ce monde que j aime appeler MIEN, qui me deplait et que je choisis dignorer mais qui m est soudain colle sous les oreilles et qui m excede.. c est ca du racisme?

16:17  
Anonymous Anonyme said...

Ceux dont vous ne parlez pas dans votre texte, ce sont ces gens qui vous écoutent. Qui sont-ils pour que vous ayez si facilement mauvaise conscience face à eux? Ca ne peut pas être vos amis...

20:47  
Anonymous Anonyme said...

parce que les amis ne jugent pas?
parce qu'ils ne doutent pas?
l'auditoire est le miroir de ma propre (mauvaise) conscience, le regard qu'il me renvoie n'a peut-être jamais existé
lh.

22:59  

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