vivant
je ne me suis pas lavé samedi, je ne me suis pas lavé dimanche, je ne me suis pas lavé du week-end, je me suis lavé, la dernière fois, vendredi matin, j'ai pris une douche, j'ai hésité avant de mouiller mes cheveux, je ne savais pas si j'avais envie qu'ils frisent, je savais qu'une fois sous l'eau, ils allaient prendre ce pli définitif, qui n'est pas un pli mais une ondulation, j'ai pourtant mis la tête sous l'eau, peut-être que j'ai attaché les cheveux au sortir de la douche avec un élastique, pour les raidir une fois essorés, je ne me souviens plus, c'était vendredi, vendredi soir on est resté à la maison, samedi matin je ne me suis pas douché, je n'avais pas envie, je devais me raser mais là encore l'envie n'y était pas, le samedi s'est écoulé sans que je mette le pied dehors, le samedi soir on est resté à la maison, le dimanche matin, je ne me suis pas lavé, je ne suis pas passé sous la douche, j'ai hésité même à m'habiller, la veille j'avais fait un effort, même sale j'avais porté les vêtements de la veille, dimanche jeanpierre m'a proposé d'aller nous promener au bord de la mer, j'ai dit que je n'avais pas envie de me laver, c'était le milieu de l'après-midi, le vent soufflait, l'air de la mer s'est chargé de saler mes mèches raidies par deux jours sans eau, le vent se prenait dans la masse, recomposait les boucles violemment, jeanpierre a pris des photos splendides, je me suis allongé sur les galets, nice, j'ai regardé le ciel blanc, aveuglé par la luminosité, on est rentré à la maison avant la tombée de la nuit, je me suis déshabillé, jeanpierre a dit : tu ne vas pas te laver maintenant quand même? mais je n'en avais pas l'intention, on a regardé une série à la télé, et puis une autre, c'est fou le nombre de séries que l'on regarde le week-end, c'est fou ce que les gens sont beaux et bien habillés et bien coiffés dans les séries américaines, c'est fou ce que les gens sentent bon dans les séries américaines, c'est fou la différence qu'il y a entre les gens dans la télévision et les gens devant la télévision, c'est fou ce qu'on peut être vivant et ce qu'ils peuvent être morts
10 Comments:
Hygiène corporelle douteuse mais plume et regard très sûrs. Très beau billet, lo (l'eau ?).
Les galets, j'ai, et le vent, en abondance. La télé, je n'ai pas (je n'ai d'ailleurs jamais vu d'aucune façon les 3/4 des séries évoquées sur les blogs...) ^^
Je crois que je ne vais plus te faire la bise....
t'envier ou te plaindre, jonas?
n'avoir jamais vu la cinquième saison de six feet under…
sandrine et sébastien, qui te cernent ici (et se sont, sans se connaître, transmis le virus), ne me contrediront pas ;-)
lh.
Ne pas se laver, bien sûr. On se lave trop, beaucoup trop. Mais de là à regarder des séries américaines — il y a un rapport suspect : une intelligence du corps liée à une sottise de l'esprit. Comme une contradiction perverse. Toujours les clichés (et pas ceux, superbes, de jeanpierre).
me rappelle cette réflexion récurrente, familiale, sur la beauté de la mère et l'intelligence du père chez le fils prodige, et l'inverse chez l'autre
perversion et contradiction assumées, azure-te, nina myers en porte-drapeau ;-)
lh.
je parcours un peu les archives... j'aime beaucoup ce billet!
C'est fou ce que c'est bon de ne pas se laver... errer en guenilles, glandouiller hirsutes et libres.
J'adore ce texte, il parle un peu de moi...
Je dis toujours à mes enfants que "C'est pour de faux à la télé!"
vous remontez dans le temps, ça me touche
lo.
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